Un groupe d’Orthéziens à Orthez (64): Qu’est-ce qui nous rassemble / Delphine Balley

 

« Qu’est-ce qui nous rassemble? »
Accompagnés depuis plusieurs années par l’association pointdefuite et image/imatge (centre d’art implanté à Orthez depuis plus de trente ans qui assure la promotion et la diffusion de l’image contemporaine), un groupe d’orthéziens s’est engagé dans un processus de commande, selon le protocole Nouveaux commanditaires. Ces habitants de différentes générations se sont intéressés à l’identité et à l’histoire d’Orthez pour rendre présent ce qui constitue le ciment de la ville, ce qui les rassemble dans une communauté de citoyens.
L’artiste Delphine Balley travaille dans la région lyonnaise et développe depuis plusieurs années un travail photographique. Elle construit et compose des mises en scène souvent inspirées de faits divers, de scènes familiales, d’histoires vraies et de faits passés ou intemporels. Ses séries photographiques reconstituent et théâtralisent faits divers, scène
familiales, scènes d’avant ou d’après crime, histoires vraies avec une extrême minutie, un goût
prononcé pour le motif et le détail. Les saynètes, métaphores du quotidien que l’artiste agence grâce à de nombreux éléments qu’elle collecte, sont autant de huis
  clos hors du temps qui mêlent savamment réalité et fantastique. La particularité du travail de Delphine Balley réside justement dans cette singularité qui transporte le spectateur dans un univers insolite, étrange, inquiétant, parfois dérangeant, mais toujours empreint d’humour et de dérision. Delphine Balley navigue entre la chronique, le journalisme, la narration, le conte ou encore le cinéma. De ses multiples influences (Vélasquez, Goya, Magritte, Ellroy, Giono, Kubrick), elle tire un regard particulier, reconstituant ainsi, par le truchement des cadrages, des lumières et des savantes mises en scène, des tableaux aussi classiques que novateurs.


L’ACTION MENÉE PAR L’ARTISTE

Lors de rencontres avec l’artiste Delphine Balley, les commanditaires ont égréné des évènements passés ou actuels qui leur paraissaient refléter la capacité de la ville à intégrer de nouveaux groupes d’arrivants. De son côté, profondément intéressée par les croyances et traditions régionales, l’artiste s’est plongée dans les différents univers des histoires et anecdotes racontées par les commanditaires. Ensemble, ils ont questionné les différentes problématiques de « Qu’est-ce qui nous rassemble ? Qu’est-ce que nous pouvons partager entre anciens et nouveaux arrivants. En réponse, l’artiste a proposé cinq photographies, chacune renvoyant à des moments forts de l’histoire orthézienne, depuis le « drame d’Orthez », la mort de Gaston Fébus, figure emblématique de la ville jusqu’à la célèbre salle de la Moutète et l’Elan béarnais, en passant par la tradition du pèle-porc, celle du carnaval et la présence protestante dans la ville.

 

Jamais je n'aurai de joie

 

Jamais je n’aurai de joie aussi parfaite qu’avant, 2012, photographie, 130 x 153 cm. Dans cette photographie, Delphine Balley évoque le « Drame d’Orthez », la mort du fils du prince de Béarn, Gaston Fébus, figure mythique de l’histoire de la ville. Tous les acteurs se sont absentés. Ne reste qu’un décor, scène d’un crime passé, réel ou fantasmé, qui agit sur l’inconscient collectif, comme acte fondateur de la ville.

 

Aller au désert

 

Aller au désert, 2013, Photographie couleur, cadre bois doré, 127 x 156,5 cm.
Ici, l’artiste fait allusion à l’interdiction de pratiquer le protestantisme au XVIIe siècle. Cette image évoque une célébration, en famille, secrète. Une évocation des crises religieuses qui touchèrent la Ville d’Orthez. Si le sujet est abordé aujourd’hui de manière apaisée, il n’en demeure pas moins brûlant dans notre société contemporaine.

 

Le grand manger

 

Le grand manger, 2013, Photographie, 130 x 160 cm.
Une sorte de fièvre annonce l’arrivée d’une autre saison. C’est le temps du Carnaval en Béarn, moment de multiples festivités et d’inversion sociale. L’artiste a mis en scène les symboles traditionnels les plus forts de cette manifestation populaire qui perdure encore aujourd’hui.

 

Pèle porc

 

Pèle porc, 2013, photographie, 130 x 160 cm.
Nous voilà dans la grande tradition orthézienne avec l’évocation de ce moment de solidarité de voisinage qu’est la pélère. Entre voisins, amis, il s’agit de tuer le cochon. Référence directe à l’histoire de l’art, cette « nature morte » rappelle aussi les tableaux de Rembrandt ou de Soutine. Pour les commanditaires, c’est bien lui, le cochon, le gardien de la tradition !

 

Touches-y si tu l'oses

 

Touches-y si tu l’oses, 2013, Photographie, 130 x 160 cm.
Un clin d’oeil à la salle de basket devenue mythique de la Moutète « qui transpirait et suait pendant les matchs », selon les dires d’un ancien joueur. Ces rassemblements sportifs déclenchaient dans la ville une liesse et un enthousiasme joyeux et bon enfant, l’expression d’une certaine fierté d’être ensemble et d’appartenir à un même territoire.