Un groupe de bayonnais d’une ZUP à Bayonne (64): Zupversions, Zupstitut, Zupçons / Vincent Labaume

 

Oeuvre

 

Dans le cadre de la réhabilitation de la ZUP Sainte Croix, conçue par Marcel Breuer il y a 40 ans, la mairie de Bayonne organise une année Breuer. Dans le même temps, un groupe de Bayonnais de la même Zup ressent le besoin de faire connaître l’histoire de leur quartier aux autres citoyens et décident de faire appel à l’association Pointdefuite pour la mise en place d’un projet artistique. Les commanditaires désirent créer une œuvre à partir des archives de Marcel Breuer rendre compte du caractère exceptionnel de cet ensemble d’habitation conçu dans les années 70. Pointdefuite propose au groupe de commanditaires de rencontrer Vincent Labaume.

Né en 1965 à Cosne-sur-Loire, France, Vincent Labaume vit à Clichy et travaille à Paris. Ennemi des séparations et des autorités, sa pratique vise à introduire dans chaque discipline qu’il investit, un virus polygraphique spécial, un détail grinçant qui emporte les conventions, et relance la fable « anarchique ». Il est tour à tour : bibliographe, poète publicitaire, diffuseur d’ambiance culturelle, critique d’art, enquêteur et biographe, producteur et animateur de radio, performer et plasticien.

 

L’ACTION MENÉE PAR L’ARTISTE

A la problématique posée par le groupe de Nouveaux Commanditaires, Vincent Labaume préfère articuler son travail à partir de la mémoire des habitants qui ont occupé la ZUP. Il divise alors cette commande en trois temps qui correspondent à  trois « actions » : Zupversions, Zupstitut, Zupçons. Les Zupversions est un ensemble d’objets agencés sous la forme d’une installation créée par Vincent Labaume. Le Zupstitut est un cabinet de curiosité mobile constitué de sept parties, rappelant les sept immeubles. Ce meuble qui retrace 40 ans de design populaire conserve les Objets intitulés Les Zupversions. Le Zupstitut fait désormais partie de la collection du Fonds régional d’art contemporain d’Aquitaine. Les Zupçons, est le troisième volet de la commande et se présente sous la forme d’un récit écrit par l’artiste à partir des rumeurs recueillies auprès des sept gardiennes de la ZUP Sainte-Croix, commanditaires de cette oeuvre.

 

Oeuvre Oeuvre

 

Texte de Jeanne Queheillard : 

Buffet de style scandinave, élément de cuisine en formica, meuble en laminé blanc, rangement en osier pour salle de bain, bureau informatique en contreplaqué de bouleau, bar avec portes en verre vitrail et fond orangé, table de télévision avec pieds métal à roulettes…

Tous ces meubles rassemblés par Vincent Labaume pour constituer « Le zupstitut », sont issus d’une production industrielle de masse. Ils véhiculent une vision « démocratique » du design.

Ils sont les représentants d’une révolution domestique où l’accès au confort moderne a engagé un nouveau style de vie et un nouvel art de décorer, de bricoler et de transformer.

Isolés, ils ont la neutralité, l’humilité et la simplicité des objets de peu d’intérêt. Ce sont des meubles utiles affirmant une facilité d’entretien et une aptitude à l’emploi mais aussi choisis pour leurs formes modernes : copies, imitations et simplifications du mobilier issu du Bauhaus auquel appartenait Marcel Breuer, l’architecte de la Zup de Bayonne.

Leur agencement, comme on dirait d’une cuisine agencée, les transforme en éléments modulai
res d’un ensemble indissociable pour construire un zupstitut, présentoir à zupversions.

Face à une architecture et un mobilier orthonormés liés au mouvement moderne, dont la visée rationnelle, rentable et utile était aussi une aspiration de beauté et de pureté, ce collage introduit des distorsions et du désordre.
Chaque élément retrouve une singularité et se regarde pour son étrangeté.

Preuve en est le bar. Objet emblématique du meuble d’apparat des années cinquante, il était un des premiers meubles introduit dans les nouvelles habitations.
Quand le but était de s’occuper de la maison ordinaire pour des gens ordinaires, et de définir des besoins types, des fonctions types et des émotions types, il représente une prise de distance entre le projet moderniste et sa traduction populaire.

Novembre 2009
Jeanne Quéheillar